À une certaine époque, avoir un accès Internet était un luxe, un « plus », mais ce temps est révolu depuis longtemps. En ce temps de COVID‑19, l’Internet nous procure un lien vital vers une foule de services, travail, école, épicerie, pharmacie, banque, prestations d’urgence, rendez-vous médicaux, pour ne nommer que ceux-là.

Une connexion Internet peut faire la différence entre la vie et la mort. Le fait d’avoir à se déplacer pour se procurer des biens et des services essentiels, au lieu de les commander de chez soi en toute sécurité, peut compromettre notre sécurité et celle de nos proches.

Pourtant, les services Internet sont encore inabordables pour un grand nombre de Canadiens. Près de 9 % des enfants et des adultes au Canada ― c’est-à-dire 3,2 millions de personnes ― vivent aujourd’hui dans la pauvreté. Dans certaines régions rurales, éloignées ou nordiques, le prix de la connexion demeure prohibitif, si bien que même les ménages à revenu moyen ne peuvent se l’offrir.

Sans plus attendre, tous les ordres de gouvernement devraient faire de l’accès à Internet une priorité dans le cadre des programmes d’urgence en vigueur. Les gouvernements fournissent déjà d’autres infrastructures indispensables ― par exemple pour l’approvisionnement en eau et en électricité ―, et d’importants programmes font déjà en sorte que les ménages à faible revenu n’en soient pas privés. La pandémie de COVID‑19 montre qu’il est grand temps d’inclure Internet dans la liste des services publics essentiels et de le rendre accessible et abordable pour l’ensemble de la population.

La COVID‑19 vient multiplier les difficultés engendrées par la pauvreté. L’absence de connexion Internet figure maintenant parmi les principales préoccupations soulevées par notre clientèle, puisqu’elle entrave l’accès à tant de services essentiels.

Dans notre travail de première ligne en tant que prestataires de services communautaires et sanitaires, nous avons constaté que la COVID‑19 vient multiplier les difficultés engendrées par la pauvreté. L’absence de connexion Internet figure maintenant parmi les principales préoccupations soulevées par notre clientèle, puisqu’elle entrave l’accès à tant de services essentiels.

Avec la fermeture des bibliothèques et des écoles, les familles qui ne peuvent se payer une connexion à domicile n’ont plus de solution de rechange. Cela les désavantage grandement. Nous avons parlé avec une fillette qui faisait la queue avec sa mère pour obtenir un panier de denrées, et demander un ordinateur pour pouvoir faire ses devoirs et parler à ses enseignantes. Parce qu’elle n’a pas Internet, une personne âgée nous a dit qu’elle n’a pu assister aux célébrations de Pâques transmises par son église, qu’elle s’ennuie de ses petits-enfants et se sent perdue sans les rencontres hebdomadaires de son cercle d’amies. Et une famille d’immigrants récemment arrivée au Canada se demande comment s’inscrire à certains programmes et se prévaloir de l’aide à laquelle elle a droit.

Avant la pandémie, le regroupement national de familles à faible et à moyen revenu ACORN Canada avait mené un sondage auprès de ses membres, qui a révélé que 20 % des ménages dont le revenu annuel est de moins de 30 000 dollars n’ont pas de connexion Internet à la maison. La majorité a invoqué le prix élevé comme raison principale. Et 65 % des familles qui sont branchées se privent de nourriture ou de médicaments pour pouvoir se payer l’accès à Internet.

Le gouvernement fédéral, voyant la nécessité de l’Internet pour tous, s’était engagé à fournir à toute la population un accès Internet haute vitesse d’ici 2030, mais les familles n’ont plus les moyens d’attendre.

Voilà pourquoi nous appuyons la demande adressée par l’ACORN au gouvernement fédéral de fournir des services d’accès à Internet gratuits aux personnes à faible revenu et aux aînés à revenu fixe. L’ACORN enjoint aussi au gouvernement de travailler avec les entreprises de télécommunication afin qu’elles n’augmentent pas les prix durant la pandémie, n’imposent pas des frais supplémentaires pour la transmission des données et les dépassements, et s’abstiennent de déconnecter des personnes dont le compte est en souffrance.

De plus, nous demandons à tous les gouvernements de collaborer avec les opérateurs afin que ceux-ci fournissent du matériel informatique, des logiciels et du soutien en technologies de l’information à toutes les personnes à faible revenu. Les gouvernements et les opérateurs pourraient travailler avec le secteur à but non lucratif afin de procurer aux ménages dans le besoin des appareils soldés ou donnés.

Par ailleurs, les gouvernements devraient fournir un accès Internet gratuit pendant la pandémie dans tous les immeubles de logements subventionnés ainsi que dans les maisons d’hébergement. Cet accès pourrait être maintenu par la suite en élargissant le programme Familles branchées.

En ce moment, nous sommes nombreux à dépendre de notre connexion Internet comme d’une bouée de sauvetage pour conserver nos liens avec notre lieu de travail, les membres de notre famille et les services et ressources offerts dans nos milieux de vie. Il est temps que les dirigeants des secteurs public et privé agissent pour les millions de personnes incapables d’accéder à ce moyen de survie indispensable.

Unissons nos efforts pour brancher le Canada tout entier.

Cet article fait partie du dossier La pandémie de coronavirus : la réponse du Canada.

Photo : Shutterstock / Rawpixel.com

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Sharmini Fernando
Sharmini Fernando est directrice générale du Syme Woolner Neighbourhood and Family Centre. Membre fondatrice des organisations Ujamaa Housing Cooperative, Coalition of Agencies Serving South Asians et Alliance for South Asian AIDS Prevention, elle a une longue expérience de travail auprès des communautés immigrantes, racialisées et queers de Toronto.
Julie Callaghan
Julie Callaghan est directrice principale de la santé communautaire et de la qualité pour l’organisme Unison Health & Community Services. Elle œuvre depuis plus de 25 ans dans le secteur associatif et à but non lucratif.

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