Imaginez un groupe de 100 Canadiens ― jeunes, vieux, de tous les coins du pays et représentant sa riche diversité. Je les imagine en train de jaser, de rire, de partager des photos de leur famille. Une personne a peut-être apporté un ballon, et certains se mettent à jouer.

Dix personnes de ce groupe vivent dans la pauvreté. Bien sûr, elles s’amusent aussi à cette occasion et vous ne pourriez probablement pas les reconnaître, mais elles vivent au quotidien le stress de ne pas savoir comment faire pour nourrir leur famille et conserver un toit sur leur tête.

Sur ces dix personnes, quatre sont handicapées. En plus de leurs inquiétudes liées à la nourriture, à l’habillement et au logement, elles n’ont pas les moyens de payer les médicaments, les soins et les appareils médicaux dont elles ont besoin pour vivre.

Quand nous regardons les statistiques de plus près, nous constatons que 22 % des Canadiens ont un handicap, mais 41 % de ce groupe vivent dans la pauvreté. Les personnes ayant une incapacité sont donc surreprésentées parmi les moins bien nantis : elles sont deux fois plus nombreuses de vivre dans la pauvreté.

En poussant notre examen plus loin, nous constatons que les personnes handicapées sont moins susceptibles d’être employées que les personnes non handicapées et que, souvent, celles qui ont un emploi se retrouvent en situation de sous-emploi chronique, gagnent le salaire minimum, occupent des postes à temps partiel et gagnent un salaire insuffisant pour subvenir à leurs besoins.

Cependant, cette situation pourrait être sur le point de changer.  Dans le budget présenté en avril 2021, le gouvernement fédéral a annoncé son intention d’adopter une nouvelle prestation nationale ― la prestation canadienne pour les personnes en situation de handicap ― qui représente une mesure cruciale pour alléger les difficultés financières des personnes handicapées. Le 22 juin dernier, la ministre de l’Emploi, du Développement de la main‑d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées, Carla Qualtrough, a déposé un projet de loi qui établirait le cadre de cette nouvelle prestation.

Des Canadiens de partout au pays reconnaissent le problème et applaudissent à la solution. Un récent sondage Angus Reid révèle qu’une grande majorité de la population canadienne ― un énorme 89 % ― appuie (fortement ou moyennement) la proposition d’une prestation canadienne pour personnes en situation de handicap. Et 88 % de la population est d’avis que cette prestation est un engagement essentiel pour le gouvernement.

En tant que personne vivant avec un handicap, cela me donne beaucoup d’espoir. Ces données montrent que les Canadiens de toute allégeance reconnaissent qu’il est impératif de soutenir les personnes handicapées et de les sortir de la pauvreté.

Je ne suis pas seule à être habitée par cet espoir. Un nouveau mouvement s’est créé ce mois-ci, appelé Le handicap sans pauvreté. Formé par des Canadiens handicapés, il représente la riche diversité de nos expériences et s’appuie sur l’élan et les mouvements du passé. Nous nous sommes regroupés pour veiller à ce que le gouvernement fédéral tienne sa promesse de créer une prestation canadienne pour les personnes handicapées.

Les Canadiens ont peu confiance que nos gouvernements agissent concrètement pour sortir les personnes handicapées de la pauvreté. Selon le sondage Angus Reid susmentionné, 62 % de la population ne fait pas confiance au gouvernement fédéral à cet égard, et la proportion est encore plus grande en ce qui a trait aux gouvernements provinciaux (66 %).

Une majorité de la population (59 %) doute que la prestation promise devienne réalité. La grande majorité (74 %) estime que les trois années de consultation proposées avant d’adopter cette prestation représentent un processus trop lent.

Le handicap sans pauvreté croit que ce changement peut et doit se produire, et il veillera à ce que ce soit le cas. Nous savons que le gouvernement ne peut pas accomplir seul cette tâche colossale, et nous sommes là pour l’aider.

Nous sommes déterminés à faire du Canada un pays où aucune personne handicapée ne vit dans la pauvreté. La première étape consiste en la collaboration de nos gouvernements pour élaborer le cadre de la prestation canadienne pour les personnes en situation de handicap, et d’assurer que les besoins cette population sont entendus et qu’elle reçoit rapidement cette aide.

Ce mouvement ne fait que commencer. Il y a une place pour tout le monde à la table : les personnes ayant une incapacité ― quelle que soit la gravité du handicap ―, leurs familles, leurs amis et leurs alliés. Joignez-vous à nous, car nous savons que nous voulons tous vivre dans un Canada où nous sommes fiers qu’aucune personne handicapée ne vive dans la pauvreté.

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Michelle Hewitt
Michelle Hewitt est coprésidente du mouvement Le handicap sans pauvreté et doctorante à l’Université de Colombie-Britannique, au campus Okanagan. Gravement handicapée, elle travaille à partir de son lit, en compagnie de ses deux bouviers bernois.

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