(Cet article a été traduit de l’anglais.)

De nouvelles données pourraient aider les scientifiques et les décideurs canadiens à transformer le traitement des maladies chroniques. Au printemps dernier, des chercheurs canadiens ont découvert des preuves non équivoques que l’environnement a une incidence beaucoup plus importante que l’ascendance généalogique sur la régulation des gènes et leur impact sur les maladies. Cette découverte est ressortie d’une des plus vastes études entreprises à ce jour sur la relation entre la génétique et les stimuli environnementaux. Les données ouvrent la voie à l’utilisation conjointe de la médecine de précision et de politiques ciblées pour favoriser un mode de vie sain.

J’étais chercheur dans le cadre de cette étude qui a examiné plus de 1,6 million de données individuelles provenant d’échantillons de matériel biologique, de questionnaires sur la santé et d’expositions à l’environnement de personnes vivant à Montréal, à Québec et à Saguenay, au Québec.

L’étude a révélé comment les facteurs environnementaux influent sur l’expression des gènes ; elle a lié  la santé personnelle et l’information génétique d’un individu à ce que certains scientifiques appellent l’exposome ― l’incidence collective sur le corps humain de facteurs externes tels que la pollution de l’air et le potentiel piétonnier du voisinage.

Les participants à l’étude faisaient partie de la cohorte québécoise du Projet de partenariat canadien Espoir pour demain, la plus vaste étude sur la santé de la population canadienne, qui permet aux chercheurs d’explorer comment la génétique, l’environnement, le mode de vie et le comportement interagissent et contribuent à l’apparition du cancer et d’autres maladies chroniques.

Au cours de la dernière décennie, des données ont été recueillies auprès de plus de 330 000 Canadiens, faisant de cette étude un laboratoire de population vivant d’une grande valeur et constituant la plus vaste collecte de données sur la santé de ce genre dans l’histoire du Canada.

Cette masse de données ouvre des perspectives intéressantes pour l’utilisation de la médecine de précision. Pour la première fois dans l’histoire, il est clair que la santé et le bien-être pourraient être améliorés grâce à des thérapies personnalisées et à des mesures de prévention adaptées à chaque patient en fonction de facteurs qui lui sont propres, notamment la génétique et l’environnement. La médecine de précision pourrait être utilisée pour identifier les personnes qui risquent de contracter une maladie avant qu’elles ne se rendent chez le médecin pour se faire soigner.

Mais les chercheurs participant au projet réfléchissent également à la précision des politiques. Des populations entières pourraient récolter les fruits de politiques stratégiques qui s’inspirent de données probantes comme celles issues de l’étude.

Le cancer, les maladies cardiaques et les autres maladies chroniques sont extrêmement complexes. Leur prise en charge et leur prévention requièrent une approche à plusieurs niveaux gouvernementaux impliquant différents ministères. Lorsqu’ils collaborent, les décideurs et les scientifiques sont mieux outillés pour s’attaquer aux problèmes de transport, de disponibilité de la nourriture, de logement abordable et d’incitation à faire de l’activité physique.

Notre étude a révélé que les facteurs environnementaux sont un prédicteur de maladies respiratoires plus puissant que la génétique. C’est pourquoi la collaboration est nécessaire entre les intervenants politiques et universitaires, car il faut appliquer cette recherche à la création d’environnements sains. À titre d’exemple, les chercheurs peuvent aider les administrations municipales à planifier des projets de construction de logements et d’écoles en veillant à ce que les bâtiments soient à une distance sécuritaire des grandes voies de circulation, et à proximité de transports en commun propres et d’espaces verts.

Plus que jamais, les décideurs de tous les ordres de gouvernement collaborent avec les chercheurs pour proposer des politiques, des programmes communautaires et des investissements ciblés qui reposent sur des données probantes en vue de créer des environnements sains où les personnes peuvent s’épanouir. Davantage de partenariats sont requis pour offrir une médecine de précision aux Canadiens ; il faut aussi augmenter le financement de la recherche sur la santé de la population afin de produire les preuves nécessaires pour éclairer les décisions en matière de politiques.

Les données sont la clé de l’évolution des politiques. La collecte de renseignements – et leur compréhension ― constituent le premier pas vers une refonte des perspectives et des politiques. Le Projet de partenariat canadien Espoir pour demain est l’initiative en médecine de précision au Canada qui fournit aux scientifiques canadiens les données et les outils dont ils ont besoin. Il faut maintenant que les scientifiques et les décideurs au Canada (et ailleurs dans le monde) fassent un bond en avant.

Photo : Shutterstock / crystal light


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Philip Awadalla
Philip Awadalla est directeur scientifique national du Projet de partenariat canadien Espoir pour demain, qui est basé à la Dalla Lana School of Public Health à l’Université de Toronto. Il est aussi directeur de biologie computationnelle à l’Institut ontarien de recherche sur le cancer, directeur scientifique de l’Étude sur la santé Ontario, ainsi que professeur de génétique médicale et des populations à la Faculté de médecine de l’Université de Toronto.

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