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La santé mentale est une préoccupation grandissante au Canada, surtout depuis la pandémie de COVID-19. Environ une personne sur cinq au Canada est aux prises avec des problèmes de santé mentale ; après 40 ans, la proportion passe à une personne sur deux. Avant la pandémie de COVID-19, environ 2 % des Canadiens rapportaient des symptômes de dépression d’intensité moyenne à élevée. En 2022, cette proportion avait bondi à 14 %, soit une personne sur sept.
La pandémie a notamment eu un effet disproportionné sur les personnes préalablement aux prises avec des problèmes associés à la santé mentale et à l’usage de substances, les personnes à faibles revenus, les sans-emploi, les jeunes et les femmes ayant de jeunes enfants. De plus, les taux de pensées suicidaires sont plus élevés parmi les Noirs et les autres groupes racisés.
Près de 87 % des travailleurs de la santé ont indiqué s’être sentis plus stressés au travail pendant la pandémie, selon les données publiées par Statistique Canada en juin 2022. Avant même la COVID-19, les travailleurs de la santé étaient aux prises avec le stress, la dépression, l’anxiété, l’épuisement professionnel et un risque accru de suicide.
Ils étaient déjà plus susceptibles de devoir s’absenter du travail en raison d’une maladie ou d’une invalidité que les travailleurs de tout autre secteur. Mais actuellement, les statistiques indiquent que ces chiffres ont augmenté de manière significative, ce qui pourrait mettre en péril l’ensemble du système de soins de santé canadien.
En bref, un plus grand nombre de personnes ont besoin de soins de santé mentale aujourd’hui.
La mise en œuvre du Cadre de soins de santé mentale de qualité contribuerait grandement à la prestation de soins de santé mentale de qualité. Le Cadre reflète tant les besoins des fournisseurs que ceux des personnes ayant un savoir expérientiel présent ou passé. Pour ces deux groupes, le Cadre peut servir de base à l’identification – et à la promotion – de soins de qualité.
Bien avant la pandémie, plusieurs chefs de file du secteur des soins de santé se sont regroupés en vue de mieux soutenir le bien-être des travailleurs de la santé. Fondé en 2016, le Collectif « La santé d’abord » est formé de chefs de file provenant de plus d’une vingtaine d’organismes partout au pays. Il est dirigé par SoinsSantéCAN et la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC).
SoinsSantéCAN et la CSMC se sont associés pour aider les organismes de soins de santé à promouvoir des environnements de travail favorisant la santé et la sécurité psychologiques. Ensemble, ils ont élaboré une foule de documents de soutien. En cours de route, ils ont identifié deux facteurs d’atténuation du risque propres aux environnements de soins de santé. Le premier est la protection contre la détresse morale – autrement dit une disposition qui permet aux employés de travailler dans un environnement où règne un sentiment d’intégrité, tout en étant appuyés par leur profession, leur employeur et leurs pairs. Le second est le soutien dans l’autogestion de la santé psychologique.
Pour œuvrer en ce sens, les partenaires ont créé le Réseau de soins de santé mentale de qualité, un groupe pancanadien de chefs de file du secteur des soins de santé. Ensemble, ils sont déterminés à améliorer l’accès, à réduire la stigmatisation, à soutenir les pratiques axées sur le rétablissement et à promouvoir la santé et la sécurité psychologiques des travailleurs de la santé.
Reconnaissant les bienfaits potentiels pour l’ensemble des Canadiens, le Réseau a entrepris l’élaboration d’un cadre fondé sur des données probantes pour des soins de santé mentale de qualité. Le Cadre de soins de santé mentale de qualité est né de cet effort de collaboration. Il définit ce qui constitue des soins de santé mentale de qualité pour tous et favorise la santé et le bien-être psychologiques des travailleurs de la santé de première ligne.
Le Cadre de soins de santé mentale de qualité se compose de dix éléments :
Les éléments mesurables du Cadre améliorent la capacité des praticiens et des organismes à fournir des soins de santé mentale de qualité. Les organismes de soins de santé qui s’engagent à respecter le Cadre en tirent de nombreux avantages, notamment l’amélioration de la santé mentale du personnel et des personnes ayant un savoir expérientiel présent ou passé, l’amélioration du moral et de la productivité des employés ainsi que la diminution de l’absentéisme et du roulement de personnel.
Parmi les autres bienfaits potentiels, citons la prestation de soins accessibles, intégrés et tenant compte des traumatismes subis par les personnes aux prises avec des épisodes passés ou actuels, de même qu’un degré plus élevé de satisfaction du personnel et des personnes qui font appel à ces services.
L’élément portant sur les soins « exempts de stigmatisation et inclusifs » est particulièrement important. La stigmatisation est depuis longtemps associée à la maladie et aux soins de santé mentale. Bien des gens ont été confrontés à la stigmatisation systémique et institutionnelle, sous la forme de politiques, de programmes et de préjugés qui limitent l’accès et la qualité. Par conséquent, certaines personnes ne reçoivent pas les soins dont elles ont besoin. Permettre à des organismes du secteur de la santé et d’autres domaines de repérer et de réduire la stigmatisation profitera à tous ceux qui cherchent à obtenir des soins, y compris le personnel soignant.
Des cadres pour la qualité des soins ont déjà été élaborés dans le secteur des soins de santé au Canada, mais aucun ne portait spécifiquement sur la santé mentale en raison de sa complexité. Différents professionnels offrent des services dans des contextes variés, et la disponibilité des services varie considérablement à l’échelle du pays, tout comme la couverture d’assurance.
En outre, les déterminants sociaux, la stigmatisation et la discrimination compromettent davantage l’accès aux services. Il est urgent de mettre en place un cadre tenant compte de toutes ces réalités systémiques.
Ces dernières années, on a assisté à une augmentation de la sensibilisation à la santé mentale, de l’accès aux traitements et des ressources fondées sur des données probantes visant à promouvoir le bien-être et à prévenir et à réduire la gravité de la maladie. Les ressources, y compris celles produites par le Réseau de soins de santé mentale de qualité, vont des normes relatives à la santé et au bien-être psychologiques sur les lieux de travail et pour les étudiants du postsecondaire aux formations, en passant par les fiches-conseils. Les applications et les services de cybersanté mentale sont aussi de plus en plus disponibles, efficaces et bien accueillis. Les progrès tangibles réalisés en matière de soutien à la santé mentale dans tout le Canada nous incitent à être encore plus optimistes et à croire que le rétablissement est possible.
Le Réseau continue à concevoir et à offrir des ressources reposant sur le Cadre, mais il y a encore beaucoup à faire. Le Réseau invite les gouvernements, les organismes de soins de santé et les autres intervenants à :
Le Cadre est une déclaration audacieuse sur ce qui constitue des soins de santé mentale de qualité, dispensés au bon moment par la bonne équipe et au bon endroit. Il complète le nombre croissant de ressources et d’outils en matière de santé mentale et propose des moyens concrets de réduire la stigmatisation, de promouvoir des soins axés sur la personne et d’éliminer les obstacles auxquels sont confrontées les personnes marginalisées. Il prévoit également l’instauration d’un système de soins de santé durable par l’adoption d’une culture favorisant la création d’environnements de travail plus sûrs et la prise en compte des besoins des fournisseurs de soins.
Les auteurs tiennent à remercier Samuel Breau, gestionnaire de l’Accès à des services de santé mentale de qualité à la Commission de la santé mentale du Canada ; Nicholas Watters, directeur de l’Accès à des services de santé mentale de qualité à la Commission de la santé mentale du Canada ; ainsi que le Réseau de soins de santé mentale de qualité pour leur contribution essentielle à ce travail.