Ce numéro spécial sur l’innovation a été pensé en lien avec le symposium Nation innovante, conjointement organisé par l’IRPP/Options politiques et BMO Groupe financier, qui se tiendra le 16 septembre à l’Institut Perimeter de Waterloo, en Ontario.
Pour lancer la discussion, nous avons demandé à notre sondeur Nik Nanos d’interroger les Canadiens sur l’importance de la recherche-développement pour la prospérité du pays. Une bonne moitié d’entre eux l’a jugée très importante.
Les défis de la R-D du Canada sont scrutés par Tom Jenkins, président exécutif et chef de la stratégie d’OpenText, et président du Groupe d’experts sur la recherche-développement du gouvernement fédéral, dont le rapport est attendu sous peu. « La concurrence est une force motrice fondamentale d’innovation dans toute entreprise rationalisée », rappelle-t-il. Or l’économie fortement réglementée du Canada limite cette concurrence dans des secteurs économiques aussi vastes que décisifs.
Kevin Lynch et Munir A. Sheikh posent une équation entre les dividendes de l’innovation et la croissance de la productivité. « Pourquoi sommes-nous si complaisants face à un enjeu de cette ampleur? Où sont le sentiment d’urgence et la compréhension collective qu’il nous faut développer face aux conséquences d’un tel déficit d’innovation et de productivité sur notre compétitivité et notre niveau de vie? », demandent-ils. Excellentes questions, notamment pour le secteur privé, où le Canada se classe au 14e rang des pays de l’OCDE.
Heather Munroe-Blum, principale de l’Université McGill, note qu’en dépit d’investissements massifs de 20 milliards de dollars dans la recherche universitaire depuis 1997, nos dépenses brutes en R-D ont baissé parce que nos entreprises investissent moins en recherche que leurs concurrents.
Pour ce qui est de stimuler l’innovation, notre directeur de recherche Jeremy Leonard estime que l’approche « axée sur la force d’impulsion des sciences » a échoué, et il exhorte nos gouvernements à se tourner du côté longtemps négligé de la demande d’innovation.
John Stewart déplore que les infrastructures publiques de recherche soient moins développées au Canada que dans la plupart des pays de l’OCDE. Et il ose cette question : « Quels sont vraiment les atouts de nos centres de recherche publics? »
Selon Charles McMillan, professeur de commerce international et ancien conseiller principal en politiques de Brian Mulroney, la gestion innovante des chaînes d’approvisionnement à nos points de passage de l’Atlantique et du Pacifique est essentielle à notre prospérité de nation commerçante. Plus que jamais, écrit-il, les chaînes d’approvisionnement mondiales « sont un impératif de gestion indissociable des stratégies d’entreprise ».
Pour Shannon Wells et Geordie Hungerford, les entreprises à forte croissance sont la clé de notre prospérité. Or ces fameuses « gazelles », comme on les surnomme, « sont peu nombreuses mais ont une importance d’autant plus grande en termes d’innovation, de création d’emplois et de croissance à long terme ».
Le secteur du design doit être partie intégrante du « paradigme d’innovation », plaident Sara Diamond et Linda Lewis, pour qui notre maigre bilan s’explique notamment par « une réticence à reconnaître le rôle clé du design ». De l’iPod à l’iPad, soulignent-elles, le triomphe d’Apple ne repose-t-il pas en grande partie sur l’irrésistible attrait du design?
Marielle Piché, ancienne secrétaire générale du Conseil canadien des chefs d’entreprise, et Kevin Goheen, spécialiste des crédits d’impôt en R-D d’entreprise, préconisent pour leur part de centraliser l’accès au financement public de la R-D. Et depuis leur poste d’observation au Conseil canadien des chefs d’entreprise, John Manley et Ross Laver rappellent les rudes étapes à franchir entre l’éclair de génie en innovation et la conquête des marchés. Enfin, Gary Polonksy retrace le parcours de l’Institut de technologie de l’Université de l’Ontario, dont il a été le président-fondateur.
Examinant l’épineuse question de l’innovation du point de vue de l’industrie pharmaceutique, le président de Rx&D, Russell Williams, note que « la concurrence internationale en investissements de recherche est d’autant plus féroce qu’avec l’avancée des technologies et des communications, la recherche est devenue hautement transférable ». Avec 1,3 milliard de dollars annuels, le secteur pharmaceutique est certes le deuxième investisseur en R-D du Canada, poursuit-il, « mais cela représente moins de 1 p. 100 de ce qui est consacré mondialement à la recherche pharmaceutique ».
Dans notre rubrique Passages, nous publions un extrait du livre de Jonathan Kay, Among the Truthers, qui décrit comment le mouvement Tea Party et ses sympathisants ont voulu prouver que Barack Obama n’est pas né aux États-Unis et n’était donc pas éligible à la fonction présidentielle. Suit un compte rendu élogieux d’Adam Daifallah.
Sur une note plus personnelle, signalons à regret le départ de Sarah Fortin, notre rédactrice en chef adjointe, qui nous quitte pour de nouveaux horizons. Notre riche collaboration à la revue aura duré près de neuf ans. Chargée de commander et d’éditer les articles de langue française et dirigeant ces dernières années notre numéro estival (consacré le mois dernier à la politique agroalimentaire), elle a créé un solide réseau de collaborateurs francophones et s’est acquittée de ses responsabilités avec un professionnalisme remarquable. Il va sans dire qu’elle nous manquera beaucoup, même si nous sommes heureux pour elle. Bonne chance, Sarah ! Et mille fois merci !