Le dernier rapport du commissaire aux langues officielles nous confirme un élément essentiel : les francophones doivent continuer à veiller au respect de leurs droits linguistiques, de la dualité linguistique et de la prestation des services gouvernementaux fédéraux en français. Cette vigilance comprend au départ l’obligation de déposer des plaintes et de soumettre aux tribunaux tout conflit et tout manquement aux dispositions législatives.

Comme les francophones sont en situation minoritaire au Canada, rester vigilants, c’est aussi ne pas laisser s’effriter tous les progrès faits et les combats menés pour assurer la dualité linguistique au Canada et la prestation des services gouvernementaux dans les deux langues officielles. Les francophones ont le devoir d’assurer un leadership au quotidien afin de protéger les acquis, et ils doivent trouver de nouvelles approches pour faire respecter la dualité linguistique. Très souvent, cette tâche revient aux associations et regroupements communautaires représentant les minorités de langue officielle, car eux seuls possèdent les structures et les moyens de faire bouger les choses.

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Un des problèmes auxquels les francophones font face est l’épuisement des « bagarreurs linguistiques ». Ces « fatigants » se trouvent dans plusieurs régions du Canada, toujours les mêmes, au point que nous notons un essoufflement, un retrait devant les manquements à la dualité linguistique canadienne ou leur acceptation. Le danger à long terme est la perte d’une vision du Canada et l’acceptation d’un pays divisé en des régions qui respectent la dualité linguistique canadienne et d’autres qui sont uniquement anglophones ou francophones.

Voilà pourquoi à long terme, le gouvernement du Canda ne peut tolérer que l’on offre des services gouvernementaux fédéraux inférieurs à ceux qui ont été planifiés ou qui sont établis, car tout le pays en paiera le prix. Manquer au devoir de la dualité linguistique, c’est revenir en arrière dans l’histoire canadienne, à la frustration du citoyen qui n’est pas desservi dans la langue de son choix et à la perte de confiance devant les instances gouvernementales.

Pour renforcer la dualité linguistique, il faut modifier la Loi sur les langues officielles et accorder au commissaire aux langues officielles des pouvoirs administratifs lui permettant d’obliger les administrateurs et les dirigeants politiques à respecter les droits linguistiques établis au niveau fédéral. Plusieurs s’y opposeront par crainte de perdre des pouvoirs ou d’être soumis à une « police linguistique ». Mais si nous voulons être vraiment conséquents avec les orientations canadiennes en matière de dualité linguistique et de respect des minorités de langue officielle, il est nécessaire d’agir immédiatement auprès des instances gouvernementales qui ne mettent pas en œuvre les principes de l’égalité des deux langues officielles du Canada.

Le rapport publié en juin par le Comité permanent des langues officielles des Communes sur la situation du Bureau de la traduction confirme la nécessité de donner à une autorité centrale le pouvoir d’assurer l’application de la Loi sur les langues officielles. Cette tâche pourrait être confiée au départ au Commissariat aux langues officielles.

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Modifier le programme de contestation judiciaire afin de permettre de poursuivre le gouvernement du Canada lorsqu’il ne respecte pas ses obligations quant à la promotion et au développement des communautés de langue officielle est une excellente mesure en soi. Toutefois, le fardeau sera toujours sur les épaules des minorités de langue officielle et, plus particulièrement, les francophones, car la très grande majorité des fonctionnaires fédéraux communiquent aisément en anglais. Cette revendication des droits demande beaucoup d’énergie et de volonté, au point que certains renoncent à faire reconnaître leurs droits.

Depuis des années, les rapports du commissaire aux langues officielles nous indiquent les progrès réalisés tout autant que les délais et les manquements en matière de dualité linguistique canadienne. Si nous voulons réaliser notre vision du Canada, la meilleure approche est bien plus souvent administrative que juridique.

 


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Gilles LeVasseur
Gilles LeVasseur est professeur de gestion et de droit à l’Université d’Ottawa. Il a travaillé auparavant, pendant plus de 25 ans, comme haut fonctionnaire au gouvernement du Canada dans les domaines du droit, de la santé et de la gouvernance. Ayant publié plusieurs ouvrages en gestion et en droit, il écrit régulièrement sur les politiques et pratiques gouvernementales.

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