Le plus gros client du Canada, les États-Unis, se réoriente vers le protectionnisme. Les puissances émergentes transforment l’économie mondiale. L’intolérance s’accroît, y compris au Canada. La technologie révolutionne la nature du travail.
Nous nous devons de préparer les jeunes Canadiens à relever ces défis. Nous aurons besoin d’eux pour établir des liens à l’échelle mondiale, élargir et diversifier nos relations de commerce, préserver les valeurs d’ouverture et de tolérance, et s’accomplir dans leurs rôles d’employé et d’entrepreneur au sein de l’économie de demain.
L’éducation internationale fait partie de la solution. L’apprentissage à l’étranger — dans les salles de classes ou les stages de travail — favorise les compétences du 21e siècle que les entreprises canadiennes recherchent chez les employés : adaptabilité, résilience, travail d’équipe, conscience interculturelle et compétences en communication. Les étudiants qui participent aux programmes à l’étranger ont davantage tendance à terminer leurs études et à obtenir un diplôme avec d’excellentes notes. Les étudiants issus de milieux défavorisés y retirent un maximum d’avantages.
Ce sont les conclusions fournies par le Groupe d’étude sur l’éducation mondiale, un groupe indépendant de leaders des milieux universitaires et d’affaires ainsi que d’experts en politiques, dont nous étions coprésidents. Cette étude, rendue publique le 8 novembre dernier, propose une augmentation substantielle de la participation des étudiants postsecondaires aux études et à l’apprentissage à l’étranger.
Aujourd’hui, relativement peu d’étudiants canadiens aux études postsecondaires vivent une expérience internationale, soit 11 % des étudiants de premier cycle. En France, environ 33 % des étudiants de premier cycle effectuent une partie de leurs études à l’étranger. En Allemagne, ce sont 29 %, en Australie et aux États-Unis, 19 et 16 % respectivement.
Par contre, le pourcentage de Canadiens qui s’inscrivent à des universités étrangères pour l’ensemble de leur programme d’études est supérieur à celui de certains pays homologues, quoiqu’il n’y ait pas de données sur le nombre d’étudiants qui reviennent au Canada. Une expérience internationale devrait constituer un élément central de l’éducation postsecondaire dans les institutions canadiennes.
La plupart des pays homologues du Canada ont lancé des stratégies ambitieuses pour augmenter la participation à l’éducation internationale. Par exemple, en 2009, les États-Unis ont lancé une initiative visant à relever à 100 000 le nombre d’étudiants américains faisant des études en Chine dans les prochains cinq ans. Après avoir dépassé leur cible, ils ont mené une campagne avec l’objectif de doubler le nombre total d’étudiants américains en éducation internationale d’ici la fin de la décennie. De son côté, l’Allemagne vise à accroître le pourcentage de sa population étudiante en éducation internationale de 29 à 50 % d’ici 2020. L’Australie, avec le New Colombo Plan, souhaite offrir chaque année à 10 000 étudiants des études universitaires, des stages de formation et de travail dans la région de l’Asie-Pacifique.
Le Canada n’a pas adopté de stratégie en ce sens, et cela se voit. Bien que des collèges et universités aient leur propre programme d’études à l’étranger, leurs efforts n’ont pas amélioré le résultat d’ensemble du Canada. En outre, la plupart des étudiants canadiens qui poursuivent des études à l’étranger le font aux États-Unis, en Europe de l’Ouest et en Australie — et étudient dans leur langue maternelle. Nous ne les préparons pas suffisamment pour un monde multipolaire.
Le Canada devrait se fixer l’objectif d’augmenter de 11 à 25 % sur 10 ans le taux d’étudiants canadiens qui participent à des programmes à l’étranger.
Que faire dans ce cas ? Premièrement, il faut que nous considérions l’éducation internationale comme un instrument pour parvenir aux objectifs nationaux, notamment une main-d’œuvre dynamique, une société ouverte et inclusive, et un pays ayant des liens et exerçant une influence à l’échelle mondiale. Les études et l’apprentissage à l’étranger sont bénéfiques autant pour nos étudiants que notre société.
Deuxièmement, nous devons nous fixer l’objectif d’augmenter de 11 à 25 % sur 10 ans le taux d’étudiants canadiens qui participent à des programmes à l’étranger. Pour susciter un tel changement, le Groupe d’étude propose une nouvelle initiative — Expérience internationale Canada — afin d’aider 15 000 étudiants postsecondaires canadiens par année à faire des études à l’étranger au cours des 5 prochaines années, ce nombre passant à 30 000 par année en 10 ans.
Il est également crucial de motiver les étudiants à étudier et à travailler dans les pays émergents en offrant une formation culturelle et linguistique. En moins d’une décennie, la moitié des participants à Expérience internationale Canada devraient pouvoir se rendre dans un pays émergent.
Nous devrions aussi fournir un appui ciblé aux étudiants qui éprouvent des difficultés à participer aux programmes d’études et d’apprentissage à l’étranger — y compris les étudiants de familles moins nanties, ceux qui sont les premiers de leur famille à s’inscrire à des programmes d’études postsecondaires, et les étudiants autochtones —, afin que tous les jeunes Canadiens aient accès aux avantages de l’éducation internationale.
Finalement, pour parvenir à ces objectifs, le Groupe d’étude propose un partenariat pancanadien. Les gouvernements provinciaux et fédéral, les administrateurs d’universités et de collèges, les professeurs, les étudiants ainsi que le secteur privé ont tous un rôle à jouer. Toutefois, la direction d’Ottawa en tant que coordonnateur, catalyseur et investisseur principal est indispensable.
Dans ce monde qui devient de plus en plus complexe et compétitif, il est maintenant temps d’investir dans les jeunes Canadiens. Leur avenir et celui du Canada en dépendent.
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