Les économistes croient presque universellement aux vertus de la croissance économique et, malgré mes positions parfois hérétiques sur certaines questions, il y a suffisamment d’économiste en moi pour que je partage ce point de vue. La croissance économique soutenue est essentielle aÌ€ l’amélioration de la qualité de vie de nombreux peuples du monde. AÌ€ elle seule, la redistribution ne suffit pas. Par contre, le lien entre croissance et mieux-é‚tre est de moins en moins bien défini. AÌ€ cause de plusieurs phénomé€nes ”” dont la dégradation de l’environnement, la multiplication des inégalités sociales et la mondialisation ”” la croissance et l’efficacité économiques ne se traduisent plus autant par une amélioration concré€te de la qualité de vie individuelle et collective. Les trois priorités que j’ai choisies démontrent, de manié€res différentes mais complémentaires, que pour traduire le progré€s économique en progré€s humain, il faut une volonté de plus en plus grande d’intervenir avec des mesures délibérées qui façonnent et réglementent la croissance ”” plutoÌ‚t que de laisser faire en présumant qu’une vague montante soulé€vera tous les navires.
Les graphiques 1 et 2 extraites de Poverty by Postal Code, un récent projet mené par Centraide dans la région mé- tropolitaine de Toronto, montrent comment la pauvreté urbaine a évolué aÌ€ Toronto au cours du dernier quart de sié€cle. Certes, l’inégalité entre quartiers est plus prononcée aÌ€ Toronto que dans n’importe quelle autre ville canadienne, mais on retrouve quand mé‚me une situation semblable dans plusieurs villes.
Le graphique 1 illustre la pauvreté aÌ€ Toronto en 1981, le second la situation vingt ans plus tard. Deux tendances peu- vent é‚tre observées. En premier lieu, que la pauvreté a aug- menté : le nombre de familles pauvres a connu une augmentation marquée, malgré la croissance économique continue. En second lieu, géographiquement parlant, la pauvreté s’est concentrée davantage dans les quartiers pau- vres. En 2001, 43 p.100 des familles pauvres vivaient dans des quartiers pauvres, comparativement aÌ€ seulement 18 p. 100 en 1981. Autrement dit, les pauvres sont plus sus- ceptibles de vivre laÌ€ ouÌ€ la pauvreté se concentre (géo- graphiquement et ethniquement). Cette situation tend aÌ€ accentuer l’impact de la pauvreté sur la santé, les perspec- tives économiques et la vie familiale et aÌ€ perpétuer la pau- vreté avec une intensité accrue (souvent violente) au sein de communautés bien définissables.
L’incidence globale du faible revenu chez les ménages canadiens a été relativement stable ces dernié€res années, en dépit d’une amélioration notable de la performance globale du marché du travail. C’est décevant, mais ainsi mesuré, on dirait aÌ€ tout le moins que le problé€me de la pauvreté ne s’est pas aggravé. Toutefois, les indicateurs statistiques révé€lent également que cette stabilité globale de la pauvreté recé€le deux tendances inquiétantes : une intensification de la pau- vreté chez les ménages aÌ€ faible revenu, et une concentration accrue de cette pauvreté dans des zones géographiques et/ou communautés ethniques plus définies. Autrement dit, peut- é‚tre bien que la pauvreté dans son ensemble ne s’aggrave pas, mais il reste qu’elle se concentre et s’intensifie et que ses impacts sociaux et économiques (y compris sur les non- pauvres) couÌ‚tent plus cher.
L’incidence des emplois aÌ€ bas salaire (moins de 10 $ l’heure) chez les salariés aÌ€ temps plein n’a pas changé depuis vingt ans, malgré l’augmentation du niveau de scolarisation et d’expérience. De plus, les bas salaires sont de plus en plus concentrés dans des groupes identifiables de la population active. Par exemple, chez les nouveaux immigrants appar- tenant aÌ€ une minorité visible, le tiers des salariés aÌ€ plein temps travaille aÌ€ bas salaire. L’inégalité entre quartiers urbains a également augmenté, tout comme la concentration et l’intensité de la pauvreté chez les autochtones vivant en milieux urbains. De plus, l’intensité de la pauvreté ”” autrement dit, le montant par lequel les ménages aÌ€ faible revenu se situent sous le seuil de faible revenu ”” s’est aussi aggravée, malgré la remontée des indicateurs globaux du marché du travail. Tout cela suggé€re que l’impact de la pauvreté sur le bien-é‚tre de la famille et de la collectivité est d’autant plus intense.
L es recherches sur le « capital social », de mé‚me que sur les cau- ses et les conséquences de l’exclusion sociale, suggé€rent que la privation, qu’elle soit absolue ou relative, a des effets négatifs mesurables et prévisibles sur le niveau de scolarisation, la stabi- lité familiale, la santé, la criminalité et d’autres importants indicateurs socio- économiques. Ces effets ne sont pas circonscrits aux seuls individus qui sont victimes d’exclusion sociale : ils entraiÌ‚nent des couÌ‚ts pour l’économie et la collectivité dans son ensemble. De plus, la littérature sur le développe- ment économique est marquée par une sensibilité nouvelle aÌ€ l’importance de la qualité de vie et des conditions urbaines en tant que condition essen- tielle aÌ€ l’investissement, au développe- ment économique et aÌ€ la prospérité. On reconnaiÌ‚t désormais les attributs urbains comme étant des variables cru- ciales qui permettent d’attirer et de retenir une main-d’œuvre tré€s instru- ite, ainsi que les investissements qui tendent aÌ€ l’accompagner.
C’est pour ces raisons que la con- centration accrue de la pauvreté au Canada, au sein de quartiers précis et au sein des minorités visibles, est une tendance dangereuse dont il faut s’in- quiéter. Les mesures politiques des- tinées aÌ€ corriger ce problé€me devront passer par une amélioration des pro- grammes de sécurité du revenu (les nouveaux Canadiens, en particulier, ne sont pas bien servis par les pro- grammes existants), ainsi que par la prestation directe de services (loge- ments, garderies et autres) aux ménages et quartiers aÌ€ faible revenu, afin de contribuer aÌ€ leur bien-é‚tre et d’améliorer leur participation au marché du travail et leur succé€s sur ce marché. Enfin, elles devront passer par le renforcement des politiques, struc- tures et ré€glements du marché du tra- vail afin de réduire l’incidence du travail aÌ€ bas salaire.
Comme l’indiquent les graphiques 1 et 2 la température moyenne de la surface du globe a grimpé d’un net degré Celsius au cours du dernier quart de sié€cle. La température moyenne au sol a augmenté encore plus. Les mo- dé€les climatiques montrent que la tem- pérature moyenne de la surface de la Terre va probablement augmenter de trois degrés d’ici cinquante ans.
Les climatologues acceptent aÌ€ peu pré€s tous l’évidence du changement climatique entraiÌ‚né par la pollution, de mé‚me qu’ils prédisent aÌ€ peu pré€s tous qu’en l’absence de mesures com- pensatoires énergiques, ce change- ment s’accélérera dans les prochaines décennies. Les conséquences possibles des changements climatiques sont énormes : sécheresse, phénomé€nes météorologiques violents, altération des climats régionaux (avec ce que cela implique au niveau de la biodiversité, de l’agriculture et du bien-é‚tre social), élévation du niveau de la mer, et d’autres encore. L’impact sur le Canada pourrait é‚tre assez important, étant donné l’équilibre écologique fragile qui prévaut dans plusieurs régions du pays (notamment dans l’Arctique).
D’apré€s les estimations de certains économistes, le changement clima- tique mondial couÌ‚te déjaÌ€ au Canada de 1 aÌ€ 3 p.100 de son PIB chaque année, somme qui va en augmentant. Entre autres exemples de couÌ‚ts économiques majeurs, citons les changements biologiques (comme l’étalement nordique du dendroctone du pin, qui a déjaÌ€ fait des ravages dans les foré‚ts de l’Ouest), les dommages créés par les phénomé€nes météorologiques violents et l’augmentation des couÌ‚ts liés aux ajouts de capacité de génération d’élec- tricité (du moins, au centre du Canada), rendus nécessaires en raison de l’augmentation des besoins de cli- matisation en période estivale.
La plupart des gouvernements du monde, dont le Canada jusqu’aÌ€ présent, ont reconnu la nécessité d’adopter des stratégies multilatérales pour limiter la production de gaz aÌ€ effet de serre, et ce, dans le cadre d’un effort aÌ€ long terme pour stabiliser les concentrations de ces gaz dans l’atmo- sphé€re et freiner l’augmentation de la température mondiale. Un des résul- tats de cette prise de conscience a été le protocole de Kyoto, dont la deuxié€me phase a été adoptée aÌ€ l’unanimité (par les pays participants) l’an dernier, aÌ€ Montréal. Grandement préoccupés par le changement climatique, les Canadiens veulent que leur pays joue un roÌ‚le afin de controÌ‚ler le problé€me, voire de renverser la situation. Ils s’in- quié€tent aÌ€ juste titre de laisser aÌ€ leurs petits-enfants et aux générations sui- vantes une plané€te invivable, si la tem- pérature de la Terre continue d’augmenter.
Toutefois, jusqu’aÌ€ présent, la stratégie canadienne sur le changement climatique a été on ne peut plus déce- vante ”” pour son incapacité aÌ€ atteindre les objectifs de Kyoto, mais aussi pour ses répercussions douteuses sur les forces économiques et technologiques fondamentales qui seront cruciales aÌ€ long terme dans le développement d’une empreinte humaine écologique plus durable. La ratification de Kyoto par le Canada (appuyée par une tré€s large majorité de Canadiens) n’a été que le premier volet d’un débat public plus long et plus complexe qui déterminera comment (et si) nous atteindrons nos objectifs, qui en assumera le couÌ‚t et quels seront les impacts économiques. La question de savoir si ce processus sera bon ou mauvais pour l’économie dépendra de la manié€re dont on procédera. En ré€gle générale, on peut imaginer deux grandes stratégies de réduction des émissions de gaz aÌ€ effet de serre : faire moins ou faire plus.
Les conservationnistes insistent pour dire que les particuliers peu- vent et doivent choisir de dépenser moins (consommer moins, conduire moins, baisser le thermostat l’hiver) pour réduire d’autant l’impact polluant de leur consommation. Cette approche timide repose sur un volontariat parfois aiguillé par des incitatifs positifs ou négatifs (via le systé€me fiscal ou autrement). Mé‚me si ces stratégies réus- sissaient aÌ€ amener les particuliers aÌ€ changer de comportement, il reste que l’impact économique d’une masse de consommateurs qui déciderait de « dépenser moins » serait tré€s certainement négatif.
L’autre solution serait de prendre des mesures positives proactives afin de réduire les émissions de gaz aÌ€ effet de serre des activités économiques courantes. Les Canadiens pourraient poursuivre les activités qui con- tribuent aÌ€ leur qualité de vie matérielle élevée, mais d’une manié€re plus effi- cace (du point de vue écologique). Ceci nous obligerait collectivement aÌ€ investir de l’énergie, de l’attention et de l’argent dans la recherche de moyens plus efficaces de livrer les biens et services qui caractérisent notre qualité de vie. Si cela obligeait la société aÌ€ dépenser, aÌ€ investir et aÌ€ innover, il serait tré€s certainement profitable pour l’économie de relever le défi du changement climatique.
Si nos engagements de Kyoto ame- naient les entreprises, les consomma- teurs et les gouvernements canadiens aÌ€ dépenser des milliards de dollars pour des technologies plus propres, les trans- ports en commun, des collecteurs de méthane sur les sites d’enfouissement et des véhicules plus écologiques, l’effort aiderait aÌ€ la fois l’environnement et l’é- conomie. En fait, les gros investisse- ments dans l’infrastructure et la technologie environnementale pour- raient tré€s bien donner le coup d’envoi aÌ€ une expansion économique durable ”” comme l’ont fait les vagues d’in- vestissement dans les chemins de fer dans les années 1850, dans l’infrastruc- ture automobile dans les années 1950 et dans l’informatique dans les années 1990. Cependant, pour prendre avan- tage de cette relance économique, il faut une intervention politique puis- sante et proactive (y compris au niveau des impoÌ‚ts, des incitatifs, des dépenses directes et de la réglementation) ”” et non pas seulement de vagues appels aÌ€ la conservation sur une base volontaire.
Dé€s le premier cycle, on apprend aux économistes que le libre- échange est toujours bon pour l’effi- cacité économique. Si c’était vrai, l’économie canadienne avancerait aÌ€ pas de géant ”” car nous avons pénétré dans une nouvelle dimension de la mondialisation qui expose l’industrie canadienne aÌ€ des pressions mondiales sans précédent dans un nombre effarant de secteurs.
Or, cette nouvelle é€re de mondialisation donne lieu aÌ€ des déséquilibres sans précédent (et destructeurs) dans les flux commerciaux internationaux. La graphique 4 illustre, aÌ€ titre d’exem- ple, les échanges bilatéraux de marchandises du Canada avec la Chine. En 2005, le déficit du Canada dans ses échanges bilatéraux avec la Chine a presque atteint 25 milliards de dollars. Nos importations de la Chine ont quadruplé au cours de la dernié€re décennie (en partie graÌ‚ce aÌ€ une expan- sion de 25 p. 100 du PIB canadien).
Toutefois, nos exportations vers la Chine ont aÌ€ peine évolué ”” mé‚me si le PIB de la Chine a doublé. Compte tenu de cette évidence, on peut difficile- ment prétendre que les retombées de la croissance phénoménale de la Chine ont été nombreuses pour le Canada. On pourrait mé‚me ajouter que c’est la viabilité fondamentale de plusieurs industries canadiennes qui est en jeu face aÌ€ l’imbattable concurrence des importations chinoises.
La multiplication des liens commer- ciaux du Canada avec les marchés émer- gents (en particulier avec la Chine, mais aussi avec d’autres économies en développement rapide, comme l’Inde, la Corée et le Brésil) soulé€ve des questions et des défis qui sont, en termes de quan- tité et de qualité, différents de ceux que soulevaient nos liens avec nos parte- naires commerciaux traditionnels (dont les EÌtats-Unis, l’Europe et le Japon). Nos relations commerciales actuelles avec les marchés émergents sont plus déséquili- brées que jamais, et le déséquilibre va encore s’accentuer au cours des prochaines années, car ces économies progressent dans l’instauration de régimes socioéconomiques qui combi- nent une formidable concurrence sur le plan des couÌ‚ts, des progré€s tech- nologiques rapides et une croissance de la productivité avec des structures économiques, sociales et politiques tré€s favorables aÌ€ la croissance. La libéralisa- tion du commerce multilatéral ”” avec l’accession de la Chine aÌ€ l’Organisation mondiale du commerce ”” ou bilatéral ”” accord de libre-échange proposé entre le Canada et la Corée ”” ne ferait qu’en haÌ‚ter l’impact.
Plusieurs facteurs suggé€rent que le défi commercial posé par les marchés émergents est unique dans l’histoire. L’avantage concurrentiel sur le plan des couÌ‚ts dont profitent les produc- teurs de quelques économies émer- gentes (en particulier la Chine) est sans précédent, tant en termes d’échelle (marge proportionnelle entre les couÌ‚ts) qu’en termes de portée (prévalence dans un tré€s large éventail d’industries). La superficie des pays impliqués (laÌ€ encore, en particulier la Chine) est tré€s grande. Les change- ments technologiques et politiques ont permis aux producteurs de ces pays de commencer aÌ€ pénétrer d’im- portants marchés de services et de biens manufacturés exportables. C’est pour cela que la perturbation et la dis- location économiques causées par l’élargissement du commerce avec les économies émergentes ont une portée sans précédent qui affecte un tré€s large éventail d’industries d’exportation. De plus, les mécanismes traditionnels d’adaptation du marché (comme les rajustements au niveau de la maind’œuvre et d’autres facteurs, ou les rajustements aux taux de change) ne réussiront pas aÌ€ rééquilibrer les déséquilibres commerciaux résultants. Au contraire, la politique gouverne- mentale de ces pays est destinée aÌ€ préserver et aÌ€ améliorer les avantages sur le plan des couÌ‚ts qui ont donné lieu aÌ€ ces déséquilibres commerciaux.
Ce scénario ne laisse aucune place (du moins pas dans le grand secteur manufacturier) aÌ€ l’avantage comparatif de la spécialisation don’t parlent les manuels d’économie. Les avantages, au chapitre des couÌ‚ts, des producteurs des marchés émergents sont vigoureux et absolus d’un bout aÌ€ l’autre du secteur manufacturier, et ils portent la capacité d’éliminer aÌ€ toutes fins utiles la viabilité de la production cana- dienne (un résultat qui s’observe déjaÌ€ dans plusieurs grands secteurs et qui se fera sentir ailleurs). Outre les exporta- tions de ressources, on voit mal ce que le Canada pourra encore produire pour le marché mondial dans cette nouvelle division internationale du travail.
Si rien n’est fait, l’intégration de l’é- conomie canadienne aÌ€ de grandes juri- dictions étrangé€res qui ont une abondante « richesse » en main-d’œuvre aÌ€ bas prix exercera une pression soutenue et négative sur notre marché du travail. Cette pression se fera sentir au-delaÌ€ des industries exportatrices directement touchées : elle aura un impact d’un bout aÌ€ l’autre du marché du travail ”” fait qui a été invoqué, entre autres, par l’ancien président de la Réserve fédérale des EÌtats-Unis, Alan Greenspan, pour expliquer la stagnation du salaire réel en dépit de conditions proches du plein emploi.
Pourtant, le défi posé aÌ€ l’é- conomie canadienne n’est pas unique- ment ni majoritairement duÌ‚ aÌ€ la « main-d’œuvre aÌ€ bon marché » des économies émergentes. Il vient plutoÌ‚t d’une conjoncture unique de politiques économiques et sociales qui explique la « super-compétitivité » des exportations de la Chine et d’autres pays émergents : avancées tech- nologiques rapides (facilitées par des politiques agressives, notamment par les transferts de technologies rendus possibles par les investissements Ìtrangers directs ; politiques sur les marchés financiers et planification sectorielle subventionnées et dirigées par l’EÌtat ; gestion active des taux de change et d’autres variables clés ; et politiques proactives sur le marché du travail et la distribution du revenu qui se montrent capables (du moins pour le moment) de contenir la demande populaire de partage du gaÌ‚teau. Ces ingrédients essentiels sont le reflet d’une volonté de gérer délibérément, voire de détourner les forces du marché dans l’intéré‚t d’un développe- ment rapide. Le développement rapi- de de la Chine et d’autres pays témoigne non pas des vertus du libre- marché, mais bien de la valeur poten- tielle d’interférer sur les marchés.
C’est pourquoi le Canada a déses- pérément besoin d’une « stratégie chi- noise » (et, plus largement, d’une stratégie concernant tous les pays émergents) s’il veut soutenir ses industries dans un monde ouÌ€ les économies émergentes super- compétitives sont les forces domi- nantes. Peut-é‚tre que cette réponse politique devrait aspirer aÌ€ é‚tre aussi proactive que les stratégies commer- ciales des économies émergentes, qui se sont avérées si puissantes. Notre propre réponse politique ne peut évidemment pas reposer sur l’espoir naïf qu’il est possible de faire prendre aÌ€ nos industries un virage vers le « haut de la chaiÌ‚ne de valeur », ni sur la foi que les forces naturelles du marché feront en sorte que nous finirons un jour ou l’autre par é‚tre compétitifs aÌ€ produire « quelque chose ». Compte tenu des flux com- merciaux croissants dans les indus- tries de services hautement spécialisés, et compte tenu des expor- tations croissantes de la Chine et d’autres économies émergentes dans leurs propres domaines de compé- tences et de technologies, jamais nos « compétences » ne réussiront aÌ€ nous protéger dans cette nouvelle économie mondiale.
Notre stratégie ne peut pas non plus se concentrer sur l’assistance aux entreprises canadiennes afin qu’elles déménagent leurs investissements et leur production dans ces juridictions étrangé€res super-compétitives : cela permettrait de protéger leurs profits, mais on saperait encore davantage l’in- vestissement et l’emploi dans les indus- tries canadiennes. Notre « stratégie chinoise » devra inévitablement recon- naiÌ‚tre que, aÌ€ elle seule, la libéralisation n’offre aucune garantie d’avantage mutuel dans les échanges économiques internationaux. Il faut des stratégies proactives pour que l’expansion du commerce international et de l’in- vestissement travaille aÌ€ avantager les Canadiens plutoÌ‚t qu’aÌ€ les appauvrir.