Le président du Conseil du trésor fédéral, John Baird, a déposé le 11 avril dernier un projet de loi fédérale sur l’imputabilité et un plan d’action qui annoncent, selon le gouvernement Harper, « un changement significatif dans les modes de fonctionnement de la politique fédérale et de l’appareil gouvernemental au Canada » (message du premier ministre du Canada). Ratissant tré€s large, le volu- mineux projet de loi de 264 pages s’articule aÌ€ travers treize grands thé€mes, parmi lesquels : le financement des partis politiques, le roÌ‚le du commissaire aÌ€ l’éthique, la protection aux divulgateurs, la loi d’accé€s aÌ€ l’information, les pouvoirs de la vérificatrice générale, la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes, l’adjudication des contrats gouvernementaux, ainsi que le processus de nomination des mandataires et hauts fonctionnaires du Parlement.

Si certaines mesures proposées semblent représenter un progré€s indéniable, notamment celle qui interdit les contri- butions des sociétés, syndicats et organisations aux partis politiques, tout en limitant les contributions individuelles, ou encore celles qui encadrent plus étroitement les activités de lobbying d’anciens ministres, conseillers politiques et hauts fonctionnaires, certaines autres semblent au contraire susceptibles d’appauvrir la gouvernance démocratique sur la scé€ne fédérale canadienne. Comme ces dernié€res mesures sont parmi les plus significatives dans le projet de loi et le Plan d’action, il y a lieu de se demander si leurs effets per- vers et leurs conséquences non voulues ne seront pas supérieurs aux avantages que devraient entraiÌ‚ner les mesures progressistes. Parmi les mesures d’apparence pro- blématique, se trouve d’abord celle touchant la protection aux divulgateurs d’actes répréhensibles au sein du gou- vernement, ainsi que celle renforçant les pouvoirs de la véri- ficatrice générale.

L’objectif d’accorder une protection légale aux divulga- teurs pour leur éviter de subir des représailles est certes louable. Apré€s tout, le gouvernement tente ici de créer un environnement de travail réceptif aux préoccupations, aux interrogations et aux critiques des fonctionnaires de tous les niveaux hiérarchiques. Bref, il s’agit de permet- tre la libre expression des plaintes indi- viduelles eu égard aux actes répréhensibles qui minent la qualité de la gestion publique au sein de l’ap- pareil administratif fédéral.

Les principales mesures aÌ€ cette fin dans la Loi fédérale sur l’imputabilité peuvent é‚tre résumées comme suit :

  • Un commissaire aÌ€ l’intégrité du secteur public ayant le pouvoir d’as- surer le respect de la Loi sur la pro- tection des fonctionnaires divulga- teurs d’actes répréhensibles ;

  • Un nouveau tribunal indépendant ayant le pouvoir d’ordonner des recours et des mesures disci- plinaires ;

  • Une meilleure protection pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes qui divulguent des actes répréhensibles commis au sein du gouvernement ;

  • L’octroi de récompenses pécu- niaires par le commissaire aÌ€ l’in- tégrité du secteur public aux divul- gateurs d’actes répréhensibles ;

  • Plus d’information publique sur les actes répréhensibles.

Le recours aÌ€ une loi pour baliser la divulgation d’actes répréhensibles et, par-delaÌ€, tenter d’offrir une protection adéquate aux divulgateurs est une démarche que plusieurs gouvernements centraux ont retenue, notamment aux États-Unis, en Australie et en Nouvelle- Zélande. Mé‚me au Canada, il faut bien comprendre que cette section de la Loi fédérale sur l’imputabilité ne constitue pas une premié€re juridique, mais plutoÌ‚t une modification, somme toute sub- stantielle, de la loi adoptée en 2004 par le gouvernement libéral précédent. Ces nouvelles mesures sont-elles toutefois susceptibles d’atteindre l’objectif de pro- téger adéquatement les divulgateurs? Permettent-elles vraiment d’accroiÌ‚tre la qualité de l’administration publique fédérale canadienne, souvent réduite aÌ€ l’efficience, l’efficacité et l’économie de la gestion des programmes et politiques publiques? Pour notre part, nous croyons que non.

Le principal défi de la divulgation d’activités répréhensibles découle de l’ambiguïté collective et de l’amenuisement de la confiance orga- nisationnelle qui, invariablement, s’y conjugue. En effet, la divulgation est, par définition, un contournement de la structure d’autorité hiérarchique formelle de l’unité, de la direction ou de l’organisation aÌ€ laquelle appartient le divulgateur. C’est parce qu’il ne croit pas pouvoir compter sur le soutien de ses collé€gues et de ses supérieurs hiérarchiques que ce dernier est con- traint d’exposer la situation aÌ€ une tierce partie hors de l’organisation, en l’occurrence le commissaire aÌ€ l’intégrité du secteur public.

Or, les expériences américaine, australienne et néo-zélandaise illus- trent bien la grande difficulté, voire l’impossibilité, de préserver l’anony- mat du divulgateur et, par-delaÌ€, de s’as- surer que celui-ci ne soit pas victime de représailles. C’est tré€s exactement pour cela que la Loi fédérale sur l’imputabi- lité prévoit la création du Tribunal de la protection des fonctionnaires divulga- teurs d’actes répréhensibles.

Le mandat de ce tribunal lui per- met, entre autres choses, d’ordonner la prise de mesures de réparation en faveur des victimes de représailles, ainsi que d’ordonner la prise de sanctions disciplinaires envers les personnes ayant exercé ces représailles. Encore faut-il que les représailles soient mani- festes, claires et univoques pour que le divulgateur puisse prouver sa victimisa- tion. Et encore faut-il que ces repré- sailles ne puissent é‚tre attribuées qu’aÌ€ une seule personne ou un seul groupe (restreint) d’individus, pour qu’il puisse y avoir des sanc- tions disciplinaires dignes de ce nom. Si ce n’est déjaÌ€ assez, il faut également que la relation causale entre la divulgation et les repré- sailles puisse é‚tre établie d’une manié€re explicite et convaincante, aux yeux du tribunal, pour qu’il y ait subséquem- ment réparation. En d’autres mots, il faut non seulement prouver qu’il y a eu représailles, mais encore faut-il prouver que celles-ci sont une conséquence directe de la divulgation.

Alors que, comme il a été précédemment mentionné, l’acte de divulgation accroiÌ‚t l’ambiguïté collec- tive et amenuise la confiance organisa- tionnelle, le fardeau de la preuve que doit respecter le divulgateur n’a de sens qu’en situation d’information (quasi) parfaite. Outre les cas rarissimes ouÌ€ le divulgateur a fait l’objet de sanc- tions grossié€res et inexplicables si ce n’est qu’en guise de représailles aÌ€ la divulgation, par exemple une rétrogra- dation ou un congédiement sans justi- fication, la nature de ces dernié€res est beaucoup plus évasive, incertaine et latente que ne le suggé€re la rationalité juridique. En effet, ces représailles tien- nent habituellement aÌ€ une redéfini- tion, implicite et non avouée, des relations de pouvoir informelles ouÌ€ le divulgateur se sent ostracisé, aban- donné et progressivement exclu de la dynamique de groupe. Les divulga- teurs sont en effet souvent perçus par leurs collé€gues, subalternes et supérieurs immédiats, comme des individus au sens moral intransigeant et manichéen.

De mé‚me, le ralentissement de la progression hiérarchique d’un divulga- teur peut toujours é‚tre expliqué, aÌ€ tort ou aÌ€ raison, par de nombreux autres facteurs que l’acte de divulgation lui-mé‚me. Mé‚me dans le cas du plafonnement de carrié€re d’un divulgateur, il demeure dif- ficile de prouver que la seule raison tient aÌ€ l’acte de divulgation. Les couÌ‚ts de la divulgation pour le divulgateur sont donc élevés, multiformes et, en partie, insaisissables. Aucune loi, aussi ambitieuse et détaillée soit-elle, ne parviendra donc aÌ€ protéger adéquatement le divulgateur de ces représailles qui, faut-il bien comprendre, se traduisent aussi par des couÌ‚ts pour l’organisation.

En effet, la confiance organisationnelle est un élément essentiel au bon fonc- tionnement de toute équipe, unité ou direction administrative. L’abondante littérature sur la réduction des effectifs et la décroissance organisation- nelle a souligné aÌ€ plusieurs reprises la primauté de la confiance en tant que vecteur de performance (efficience, effi- cacité et économie). Dans la mesure ouÌ€ la modification de la Loi sur la divulga- tion d’actes répréhensibles que propose la Loi fédérale sur l’imputabilité vise aÌ€ accroiÌ‚tre la qualité de la gestion publique en rendant « le gouverne- ment plus responsable », il est para- doxal que sa mise en œuvre mine directement l’élément de confiance sur lequel repose toute action collective, y compris au sein des bureaucraties com- plexes qui composent l’administration publique fédérale canadienne.

En d’autres mots, il s’agit d’un échange (trade-off) entre, d’un coÌ‚té, la possibilité de recouvrer des fonds publics gaspillés par des actes répréhensibles et, de l’autre coÌ‚té, la certitude d’accroiÌ‚tre l’ambiguïté collec- tive et d’amenuiser la confiance orga- nisationnelle.

Ainsi, en termes économiques simples, la diminution éventuelle d’un facteur de couÌ‚t (actes répréhensibles) se traduit par l’augmentation réelle d’un autre facteur de couÌ‚t (confiance organisationnelle). Évidemment, la visibilité théorique du premier facteur de couÌ‚t est beaucoup plus grande que celle du second : le gaspillage de fonds publics est une variable qui peut faire l’objet d’une évaluation quantitative, alors que la confiance organisation- nelle est une variable qui échappe aÌ€ tout effort de quantification ou de monétarisation. La prépondérance accordée au premier facteur de couÌ‚t n’est donc pas surprenant : comme c’est souvent le cas en évaluation de programme, on ne retient pas tous les éléments pertinents, mais seulement les plus visibles ou les plus faciles aÌ€ évaluer. Enfin, il faudrait peut-é‚tre se rappeler que, mé‚me parmi les partisans d’une loi sur la divulgation d’actes répréhensibles, plusieurs considé€rent qu’un processus de déclaration interne, par lequel une unité, une direction ou une organisation peut prendre les mesures nécessaires pour corriger le problé€me et éviter sa répéti- tion, est toujours préférable aÌ€ la situa- tion de crise que crée inévitablement la divulgation externe.

AÌ€ ce premier effet pervers de la Loi fédérale sur l’imputabilité, s’en ajoute un second, lié aux mesures visant aÌ€ accroiÌ‚tre les pouvoirs de la vérificatrice générale.

La vérificatrice générale voit son pouvoir accru par ce projet de loi dans le but de « retracer les fonds » utilisés par le « bénéficiaire » (au sens de la Loi sur la gestion des finances publiques). Il est maintenant prévu d’inclure dans les accords de financement avec les bénéfi- ciaires des dispositions visant aÌ€ faciliter les vérifications comptables auxquelles se livre la vérificatrice générale.

Comme c’est le cas depuis la mo- dification de la Loi sur le vérificateur général en 1977, ces vérifications comptables incluent la gestion de la performance (autrefois appelée vérifi- cation de l’optimisation des ressources ou VOR) qui se penche notamment sur l’évaluation de l’efficience et de l’économie. Le roÌ‚le de la vérificatrice générale demeure donc radicalement différent de celui des vérificateurs externes dans le secteur privé, ouÌ€ ces derniers se limitent aÌ€ une vérification d’attestation, c’est-aÌ€-dire s’assurer que les états financiers reflé€tent adéquate- ment la situation financié€re de l’orga- nisation.

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Dans le secteur public, le vérifica- teur général s’est toujours livré aÌ€ un second type de vérification, soit la véri- fication de conformité, dont l’objectif est de s’assurer que les transactions financié€res sont autorisées par la loi ou la réglementation, donc qu’elles sont conformes aÌ€ la volonté du législateur, telle que prévue dans la loi pertinente.

Les vérifications d’attestation et de conformité, les deux roÌ‚les traditionnels de la vérificatrice générale au Canada, ne font l’objet d’aucun débat ou polémique entre experts. Il en va autrement de la gestion de la performance, qui est définie comme suit dans la Loi fédérale sur l’im- putabilité (art. 307) :

Le vérificateur général peut, re- lativement au bénéficiaire, faire enqué‚te sur l’utilisation des fonds reçus de Sa Majesté (sic) du chef du Canada et sur la question de savoir s’il a omis :

a) de se conformer aux obliga- tions de tout accord de finance- ment ;

b) de respecter les principes d’économie et d’efficience dans l’utilisation des fonds reçus au titre de tout accord de finance- ment ;

c) d’établir des procédures satis- faisantes pour évaluer l’effica- cité de ses activités relativement aux objectifs prévus par tout accord de financement, et pour faire rapport aÌ€ cet égard ;

d) de tenir fidé€lement et régulié€rement des comptes et les registres essentiels relativement aux fonds reçus au titre de tout accord de financement ;

e) de prendre en compte, dans l’utilisation de ces fonds, de l’effet de celle-ci sur l’environ- nement dans le contexte du développement durable.

L’inclusion de la gestion de la performance dans le mandat de la vérifi- catrice générale a transformé celle-ci en un véritable acteur politique qui, de surcroiÌ‚t, bénéficie d’une autorité morale et d’une crédibilité mana- gérielle dont ne peut que ré‚ver la classe politique.

Si le principe d’économie est rela- tivement simple aÌ€ évaluer, bien qu’il repose toujours en partie sur un juge- ment de valeur, le principe d’efficience demeure autrement plus complexe : contrairement aÌ€ ce que postule implicitement l’article 307, l’efficience n’est pas nécessairement le modus operandi de toute activité administra- tive. L’efficience n’est pas non plus synonyme de rationalité, mais plutoÌ‚t une valeur, de surcroiÌ‚t polysémique, parmi plusieurs autres valeurs possi- bles. Elle est également plus qu’un sim- ple ratio technique, plus que la finalité prétendument neutre et ultime de l’ad- ministration publique. L’efficience est plutoÌ‚t l’expression de la hiérarchisa- tion implicite et non avouée des valeurs privilégiées par la gestion de la performance qui, en définitive, est tou- jours partielle et subjective. L’élaboration de crité€res de perfor- mance implique l’exclusion de certains autres, leur pondération respective ne s’impose pas en elle-mé‚me et, enfin, la dimension temporelle retenue est tou- jours problématique en ce qu’elle influence les résultats de l’évaluation. Comme il a été précédemment men- tionné, on évalue ce qu’on peut, aÌ€ la lumié€re de limites cognitives, tem- porelles, matérielles et financié€res par- ticulié€res, mais jamais tout ce qui est susceptible d’é‚tre pertinent.

Il faut bien comprendre que, mal- gré les prétentions technocratiques de la gestion de la performance, sa mise en œuvre demeure irréductiblement politique. Bien que les rapports de la vérificatrice générale ne le soulignent jamais, il y a toujours une négocia- tion, donc un rapport de force poli- tique, entre celle-ci et les organisations publiques pour déter- miner les crité€res d’évaluation et les références sur lesquels repose la ges- tion de la performance. De mé‚me, il y a une seconde négociation, un second rapport de force politique, une fois que les résultats sont connus pour ten- ter d’en dégager une interprétation commune, ce qui n’est pas toujours possible. Dans ce dernier cas, le traite- ment médiatique et l’opinion publi- que tendent l’un comme l’autre aÌ€ privilégier systématiquement le point de vue de la vérificatrice générale, au détriment de celui exprimé par l’or- ganisation publique qui a fait l’objet de la vérification.

L’influence qu’exerce la vérificatrice générale au sein du débat public est donc énorme, chaque rapport étant con- sidéré comme la réponse définitive aÌ€ la question ou l’enjeu politico-administratif qu’il soulé€ve. Tout accroissement ou ren- forcement des pouvoirs de la vérificatrice générale va donc, aÌ€ son tour, amplifier son influence politique sur la scé€ne publique et atrophier, plutoÌ‚t que soutenir, le pouvoir des élus.

Cette distinction est fondamentale : l’accroissement des pouvoirs de la vérificatrice générale (ou de tout autre agent du Parlement) n’est pas synonyme d’un accroissement de la capacité de controÌ‚le démocratique des élus sur le gouvernement. Il s’agit de deux capacités distinctes. Encore faut-il, pour accroiÌ‚tre la seconde, que les différents comités parlementaires, par lesquels s’exerce le controÌ‚le des élus sur le gouvernement, s’affran- chissent de la dynamique particulié€re- ment partisane qui les caractérise. AÌ€ cette fin, la discipline de parti peut difficilement demeurer aussi rigide qu’elle l’est actuellement. Or, mé‚me en faisant l’hypothé€se audacieuse que les partis politiques sont sensibles aÌ€ ce problé€me, voilaÌ€ un défi qui dépasse la seule culture politique fédérale cana- dienne. En effet, son atteinte repose sur la conjugaison d’au moins trois éléments, aÌ€ savoir :

  1. une augmentation sensible du nombre d’élus fédéraux, afin que les députés (de tous les partis) jouissent d’une plus grande autonomie collective envers le gouvernement ;

  2. une diminution du taux de roule- ment des élus fédéraux, afin d’ac- croiÌ‚tre l’expérience et l’expertise, donc la capacité collective des députés d’arrié€re-ban ;

  3. un gouvernement majoritaire composé de coalitions de dif- férents partis politiques, ce qui, aÌ€ son tour, suppose un changement de notre mode de scrutin.

Force est d’admettre qu’aucun de ces éléments n’est susceptible d’é‚tre adopté dans l’avenir prévisible et que rien dans la Loi fédérale sur l’im- putabilité ne s’y intéresse. Bien au con- traire, celle-ci reconduit implicitement la confusion entre la capacité des agents du Parlement et la capacité des membres du Parlement.

Cette confusion est d’autant plus paradoxale que le cycle politique s’est considérablement atrophié sur la scé€ne fédérale canadienne avec l’élection de deux gouvernements minoritaires depuis 2004. Ainsi, alors que la vérifi- catrice générale est nommée pour une période de dix ans, et que tous les agents du Parlement le sont pour une période de sept aÌ€ dix ans, les députés fédéraux n’avaient été en poste que dix-huit mois lors de la dernié€re élec- tion générale. Et rien ne permet de croire qu’ils l’auront été plus longtemps lorsque sera déclenchée la prochaine élection générale. Autrement dit, alors mé‚me que se précarise le mandat des élus, la Loi fédérale sur l’imputabilité propose de renforcer les pouvoirs des différents agents du Parlement, en commençant par celui de la vérificatrice générale.

Ce renforcement de la capacité et de l’autonomie de la vérificatrice générale est particulié€rement pro- noncé : l’article 308 déclare l’immunité civile et pénale de la vérificatrice générale « pour les actes accomplis, les rapports ou comptes rendus établis et les paroles prononcées de bonne foi dans l’acquittement effectif » des responsabilités qui lui sont conférées par la loi. Il est plutoÌ‚t ironique que l’institution privilégiée entre toutes par le gouvernement pour « créer une cul- ture d’imputabilité » connaisse elle- mé‚me un effritement de sa propre imputabilité, puisqu’elle serait exempte de toute responsabilité judiciaire, tant au niveau civil que pénal.

Dans la mesure ouÌ€ les citoyens ne peuvent exercer un controÌ‚le démocra- tique, déjaÌ€ imparfait et limité, que sur les élus, et non pas sur les agents du Parlement, il est bien difficile de voir en quoi le renforcement des pouvoirs de ces derniers permet d’améliorer la gouvernance démocratique de nos institutions politiques et administra- tives. Bien au contraire, on peut se demander si le principal effet pervers de la Loi fédérale sur l’imputabilité n’est pas de cristalliser le pouvoir tech- nocratique de ces acteurs institution- nels non élus et indépendants et, par-delaÌ€, d’accentuer la « managériali- sation » des enjeux politiques. 

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