Lorsque les libéraux fédéraux ont pris le pouvoir en 2015, ils ont convenu de prioriser l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes. Michael Barber, connu pour son travail novateur dans la production de résultats, la « résultologie » (deliverology), a été invité à conseiller les principaux décideurs gouvernementaux et à créer des « unités de résultats » au sein des ministères fédéraux. Dans presque tous les ministères, l’accent a été mis sur les données.

Néanmoins, trois ans plus tard, nous n’avons toujours pas les données qui permettraient le développement d’une main-d’œuvre tournée vers l’avenir. Nos données portent essentiellement sur les métiers traditionnels, mais la nature changeante des emplois et, en particulier, la nécessité de nouvelles gammes de compétences nous obligent à élargir notre réflexion.

Le Canada a atteint un point d’inflexion en économie. L’automatisation intelligente, l’intelligence artificielle et d’autres technologies émergentes devraient redéfinir le marché de l’emploi au pays. Avant de nous inquiéter des pertes d’emploi, nous devrions nous interroger sur l’évolution du marché et la capacité du Canada à suivre cette évolution. Mais pour ce faire, nous avons besoin de données.

En effet, il faut comprendre les aptitudes et compétences requises pour les emplois futurs afin de mieux répondre à l’offre et à la demande sur le marché du travail. Il est plus que jamais essentiel que le gouvernement fédéral fonde ses politiques sur des données probantes.

De nombreux décideurs l’ont déjà compris, notamment dans l’Union européenne et en Australie, et il est temps que le Canada entre dans la course. Aux États-Unis, la base de données numérique O*NET répartit les professions en fonction des aptitudes, des connaissances, des compétences et des qualifications requises pour un parcours professionnel donné. Cette base de données permet même d’évaluer les perspectives et le potentiel de croissance des secteurs pour donner aux utilisateurs une meilleure idée des emplois futurs.

Pour maintenir son avantage concurrentiel à l’échelle mondiale, le Canada doit veiller à ce que tous les secteurs de l’économie axent leurs efforts sur le déploiement de personnes dotées des compétences nécessaires pour l’avenir.

Les emplois de demain ― ceux dans le domaine de la technologie numérique avec lesquels les agriculteurs, les monteurs et les analystes financiers travailleront ― nécessiteront chacun un vaste ensemble de compétences. Pour maintenir son avantage concurrentiel à l’échelle mondiale, le Canada doit veiller à ce que tous les secteurs de l’économie axent leurs efforts sur le déploiement de personnes dotées des compétences nécessaires pour l’avenir.

Par ailleurs, pour ajouter de la complexité à nos défis en matière de développement de la main-d’œuvre, nous devons tenir compte des départs imminents à la retraite et des relations commerciales mondiales. Ces pressions nous obligeront également à repenser l’acquisition de compétences.

En effet, avec toute une génération de baby-boomers sur le point de quitter le marché du travail, il est essentiel de connaître les compétences les plus importantes qui devraient être retenues, de sorte que les programmes de transfert de connaissances et de mentorat puissent être conçus de la manière la plus appropriée et efficace possible.

Jamais le besoin de pénétrer de nouveaux marchés mondiaux n’a été aussi grand pour les entreprises canadiennes. La demande de compétences qui nous permettent d’établir des relations interculturelles ne peut aller qu’en augmentant. Des compétences telles que la langue, l’adaptabilité et la sensibilité culturelle permettront cette croissance nécessaire de nos marchés d’exportation.

Pour que le Canada puisse opérer ce virage et modifier la façon d’aborder les données relatives au développement de la main-d’œuvre, il serait judicieux de sonder les employeurs, particulièrement ceux dans des secteurs à forte croissance, pour recueillir des données sur les compétences les plus recherchées. Et le temps presse.

Le ministère de l’Innovation a récemment convoqué des chefs de file et des dirigeants œuvrant dans les six secteurs à plus forte croissance au Canada à des Tables sectorielles de stratégies économiques dans le but de définir les possibilités de croissance sectorielles. Le ministère investit aussi près d’un milliard de dollars pour financer la transformation de cinq écosystèmes d’innovation régionaux.

Non seulement les joueurs sont en position, mais il n’y a jamais eu de meilleure occasion de réunir de données solides sur nos besoins futurs en matière de compétences. Statistique Canada se dote d’un nouveau financement, le Conseil de l’information sur le marché du travail met les moteurs à plein régime et le Centre des compétences futures sera lancé à la fin de 2018. Chaque institution a les capacités de collecter de telles données.

Jusqu’à maintenant, le gouvernement s’est montré très engagé au chapitre des données. Mais pour que le Canada puisse optimiser son potentiel de développement de la main-d’œuvre et son avantage concurrentiel mondial, il faut améliorer les données liées aux compétences en modifiant notre approche à l’égard des données.

Photo : Shutterstock / MNBB Studio 


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Daniel Komesch
Daniel Komesch est directeur des politiques à Polytechnics Canada.

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