Les Canadiens soutiennent massivement l’immigration en tant qu’élément positif de leur pays. En revanche, une forte majorité d’entre eux estiment qu’on doit maintenir ou réduire le nombre d’immigrants à son niveau actuel de près de 250 000 nouveaux arrivants par année. Telles sont les principales conclusions du sondage téléphonique réalisé par Nanos Research pour Options politiques du 29 mai au 3 juin dernier, auprès de 1 008 Canadiens.

C’est ainsi que quatre Canadiens sur cinq sont d’accord (65,3 p. 100) ou plutôt d’accord (16,1 p. 100) avec l’affirmation selon laquelle « l’immigration est une caractéristique positive du Canada en tant que pays », contre seulement un sur six qui se dit en désaccord (11,8 p. 100) ou plutôt en désaccord (4,2 p. 100) avec cette affirmation (question 1).

Mais quand on leur demande s’il faut augmenter, réduire ou maintenir le niveau d’immigration par rapport à son taux actuel, les Canadiens sont beaucoup plus ambivalents (question 2). Seulement un sur cinq (21,4p.100) estime qu’on doit en augmenter le niveau, contre près de quatre sur dix (38,9 p. 100) qui souhaitent le maintenir à son taux actuel. Un Canadien sur trois (32,4 p. 100) estime qu’il faut en réduire le niveau. Autrement dit, les Canadiens sont une fois et demie plus nombreux à penser qu’il faut réduire le niveau d’immigration plutôt que l’augmenter.

Ces résultats peuvent sembler contradictoires en regard de l’appréciation montrée dans la première question, mais ils s’expliquent par la conjoncture économique. Si nous étions en période de croissance, les Canadiens seraient vraisemblablement plus enclins à accueillir autant d’immigrants qu’il y a d’emplois disponibles. Mais comme nous sortons à peine d’une grave récession, leur attitude favorise davantage le statu quo. Bref, l’immigration fait partie de ces bonnes choses dont il ne faut pas abuser.

Les Canadiens voient non seulement l’immigration comme un élément positif mais aussi comme une condition essentielle au renforcement économique du pays (question 3). Sept sur dix se disent ainsi d’accord (51,8 p. 100) ou plutôt d’accord (18,5 p. 100) avec l’affirmation selon laquelle « l’immigration compte parmi les principaux moyens dont dispose le Canada pour renforcer son économie ». Seulement un sur quatre se dit en désaccord (18,9 p. 100) ou plutôt en désaccord (6,6 p. 100) avec cette affirmation.
Les Canadiens manifestent aussi beaucoup d’empathie face aux difficultés rencontrées par les immigrants qui s’établissent ici. Ainsi, quand on leur a demandé si les gouvernements devraient faire davantage pour aider les immigrants à s’établir, par l’entremise de cours de langue par exemple, deux sur trois ont affirmé être d’accord (45,8 p. 100) ou plutôt d’accord (19,9 p. 100). Seulement trois sur dix étaient en désaccord (24,5 p. 100) ou plutôt en désaccord (6,2 p. 100) (question 4).

Une vaste proportion de Canadiens se montre aussi sensible à la situation des travailleurs temporaires étrangers qui n’ont pas droit aux prestations d’assurance-emploi et aux indemnisations des accidentés du travail.

Pas moins de sept Canadiens sur dix se disent ainsi d’accord (55,4 p. 100) ou plutôt d’accord (15,7 p. 100) avec l’affirmation selon laquelle les travailleurs temporaires « devraient jouir des mêmes droits que les autres travailleurs » (question 5). Un résultat impressionnant mais conforme à une certaine logique, au sens où il montre que les Canadiens ont conscience que ces travailleurs sont les moins privilégiés de la population active et qu’ils se trouvent au bas de l’échelle économique sans profiter des avantages de notre société nantie, même si le fruit de leur travail contribue — souvent littéralement — à la qualité de vie des Canadiens. D’où cette empathie face à leur difficile situation.

Les Canadiens estiment aussi qu’en définitive, les immigrants s’intègrent bien à leur pays d’accueil (question 6). Sur une échelle de 1 à 5, selon laquelle 1 indique qu’ils « ne s’intègrent pas du tout » et 5 qu’ils « s’intègrent parfaitement », pas moins de 41,5 p. 100 ont choisi le 3 du milieu de l’échelle, 18,3 p. 100 le 4 et 7,9 p. 100 le 5. Autrement dit, deux Canadiens sur trois estiment que l’intégration des immigrants se fait plutôt harmonieusement. Seulement 9,2 p. 100 des répondants ont choisi le 1, qui indique une intégration nulle, et 19,8 p. 100 le 2.

Nous avons finalement demandé aux répondants si les Canadiens devaient être autorisés à posséder une autre citoyenneté que la citoyenneté canadienne (question 7). Sept sur dix ont dit être d’accord (58,9 p. 100) ou plutôt d’accord (11,8 p. 100) avec la double citoyenneté, tandis qu’un sur quatre s’est dit en désaccord (21,0 p. 100) ou plutôt en désaccord (4,2 p. 100).

Ce dernier résultat pourrait varier selon la conjoncture, comme ce fut le cas lorsque le ministère des Affaires étrangères a dépensé des millions de dollars pour évacuer du Liban des citoyens lors du conflit de l’été 2006 entre Israël et le Hezbollah. Les Canadiens reconnaissent donc le droit de leurs compatriotes de détenir un autre passeport, mais à condition que l’application de ce droit ne leur coûte rien.

Globalement, les résultats de ce sondage dénotent une attitude très positive des Canadiens à l’égard de l’immigration et de ses enjeux connexes, la seule réserve étant qu’en période économique difficile — comme celle que nous venons de traverser —, ils s’opposent dans l’ensemble à l’augmentation du nombre d’immigrants.

Photo: dennizn / Shutterstock

Nik Nanos
Chercheur et conseiller stratégique, Nik Nanos est régulièrement appelé à conseiller des dirigeants sur un large éventail de sujets, notamment les fusions d'entreprises, les campagnes de sensibilisation du public, la gestion de la réputation et les questions réglementaires. Il dirige l'équipe de Nanos, qui conduit des recherches au Canada et aux États-Unis, est fellow au Woodrow Wilson International Center for Scholars de Washington, D.C., et chercheur et professeur agrégé à  la State University of New York de Buffalo. Il est aussi analyste principal pour l'indice Bloomberg-Nanos de la confiance des consommateurs canadiens, dont les résultats sont transmis hebdomadairement aux clients de Bloomberg. Chaque semaine, il présente The Nanos Number à  l'émission Power & Politics de la CBC, qui suit l'évoution politique, économique et sociale. Il siège au comité de rédaction du Journal of Professional Communication de l'Université McMaster.

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