Quelque part en 2010, le discours international sur les changements climatiques s’est recentré sur les énergies propres. Et peut-être est-ce le discours sur l’état de l’Union de Barack Obama qui, dès janvier 2010, a marqué ce tournant. Ce discours a seulement fait mention des « changements climatiques » ; par contre, il contenait sept références à l’« énergie propre ». Il va sans dire que chaque mot d’un président américain est soigneusement pesé en pareille occasion, et que ce changement de ton et de priorité n’a échappé à personne.
Qu’est-ce que l’énergie propre, au juste ? Aux fins de notre thème mensuel, le terme désigne l’exploitation écologiquement viable des immenses ressources énergétiques du Canada.
Notre principale collaboratrice en matière d’énergie et d’environnement Velma McColl nous transporte de Copenhague à Cancún pour s’étonner du chemin parcouru en une seule année. Et pour observer que cette 16e Conférence des Parties au Mexique a fait oublier le chaos qui régnait au Danemark. C’est ainsi qu’un seul des 194 pays participants a refusé d’aller de l’avant. « Sans la sonnette d’alarme de Copenhague, conclut-elle, ces progrès de Cancún n’auraient pas eu lieu. »
Qu’en est-il maintenant de nos sables bitumineux ? C’est Bruce Carson, directeur de la School of Energy and the Environment, qui dissèque la question. Ils comptent déjà pour 55 p. 100 de la production de pétrole canadienne de quelque 2,5 millions de barils par jour. C’est ainsi qu’avec des réserves récupérables de 170 milliards de barils, notre industrie pétrolière est promise à un brillant avenir. Les impacts environnementaux sont toutefois flagrants dans plusieurs domaines, de l’usage des eaux aux émissions de GES. Mais comme le rappelle Todd Hirsch dans sa chronique, l’industrie américaine du charbon produit 64 fois plus d’émissions que les sables bitumineux canadiens.
Kevin Lynch examine pour sa part l’enjeu de la sécurité énergétique des États-Unis du point de vue canadien. Les Américains importent chaque jour 2 millions de barils de pétrole canadien, écrit-il, soit plus qu’ils n’achètent de l’Arabie saoudite et du Koweït.
Mais en dépit de ressources aussi abondantes, le Canada n’a toujours aucune stratégie énergétique axée sur le développement durable, déplore l’ancien ministre de l’Industrie et du Commerce David Emerson depuis son poste d’observation à l’Institut canadien de politique énergétique.
Le monde des affaires croit aussi que nous avons besoin d’une stratégie nationale ciblée, soutiennent Linda Hasenfratz et Hal Kvisle, respectivement PDG de Linamar et ancien PDG de TransCanada Corporation, pour « réaliser notre potentiel de grande puissance énergétique et environnementale ».
Aucune solution au réchauffement planétaire n’est possible sans les États-Unis. Or, constate Colin Robertson, la question des changements climatiques et de l’énergie propre est en pleine impasse à Washington. En raison de la crise économique qui accable leur pays depuis 2008, les Américains l’ont en outre reléguée à l’arrière-plan.
Enfin, Donald Barry de l’Université de Calgary propose à l’industrie pétrolière une liste de 10 choses à faire et à éviter face aux militants écologistes en général et aux détracteurs de l’exploitation des sables bitumineux en particulier.
L’ensemble de ces articles témoigne d’un repositionnement du débat canadien, essentiellement mené par des voix extra-gouvernementales. L’IRPP s’est joint à la fin 2009 à un groupe de 10 think tanks désireux d’enrichir le dialogue sur les questions d’énergie, historiquement propices à de vives dissensions. Ce numéro se propose donc de raffermir l’engagement d’aller au-delà des orientations politiques et de contribuer à assainir le débat, en vue aussi du prochain cycle d’échanges prévu ce printemps à Winnipeg et de la rencontre en juillet des ministres de l’Énergie fédéral et provinciaux.
Par ailleurs, les vérités et conséquences de l’affaire WikiLeaks sont analysées par Jeremy Kinsman, qui a lui-même rédigé des milliers de notes diplomatiques lorsqu’il était ambassadeur du Canada. Les messages éventés offrent selon lui « un instantané extraordinairement composite » du monde actuel.
Sous la rubrique Les provinces, Jim Feehan s’étonne de la soudaine décision de Danny Williams de quitter ses fonctions de premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, ébauchant un premier historique de la période où cette province s’est hissée au rang des nanties du pays. Et dans La fédération, Robin Sears s’intéresse aux chefs provinciaux et fédéraux, qui souffrent selon lui d’être comparés aux géants qui les ont précédés.
Adam Chapnick revient sur la tentative ratée du Canada d’obtenir un siège au Conseil de sécurité de l’ONU.
George Wyatt et Karen Black analysent pour leur part la question du remboursement des médicaments « off label », c’est-à-dire des médicaments non autorisés par Santé Canada pour l’usage qu’on en fait.
Tom Courchene et John Allan réagissent à l’article de Charles E. McClure paru dans notre numéro d’octobre dernier en réponse à leur propre article préconisant une taxe sur le carbone.
Et de la Saskatchewan, Gregory Marchildon rend hommage à Al Johnson, brillant haut fonctionnaire de cette province et qui était devenu président de la SRC au terme d’une éminente carrière.