Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications a rendu public un rapport sur l’avenir de la Société Radio-Canada (SRC). J’ai participé à cette étude, mais je ne pouvais souscrire au rapport. Certains sénateurs conservateurs qui siègent au Comité ont préféré dénoncer la SRC plutôt que de se concentrer sur son avenir. Cette étude est, en somme, une occasion ratée, d’où le rapport minoritaire que j’ai rédigé, intitulé Un plan pour une CBC/Radio-Canada dynamique et pérenne.

La SRC est face à un défi de taille. Internet continue à progresser, et des services numériques tels Netflix changent le milieu de la radiodiffusion. On consomme de plus en plus de contenu en ligne, sans compter la vive concurrence américaine qui se fait sentir depuis longtemps.

Dans ce contexte, voici ma proposition. Il est important que la SRC soit dynamique et forte pour qu’elle puisse nous rassembler, nous divertir et nous informer. Les sondages indiquent que les Canadiens la veulent. La grande majorité des témoins que nous avons entendus veulent que la SRC soit solide. Ils la veulent à la fois pour combler les lacunes des radiodiffuseurs privés – comme l’avait proposé le Comité – et, pour reprendre les propos de l’un des témoins, parce que « la SRC est le seul réseau qui réunit tous les Canadiens ».

Malheureusement, la SRC a beaucoup de mal à répondre aux exigences des consommateurs. Comment se fait-il? Pour résumer, la SRC manque d’argent. Elle reçoit 29 $ par personne, ce qui est largement inférieur à la moyenne de 82 $ par personne qu’accordent les autres pays industrialisés à leur radiodiffuseur public. À titre d’exemple, la BBC au Royaume-Uni jouit d’un financement trois fois plus élevé que la SRC.

Il faut renforcer la SRC pour que notre radiodiffuseur public soit efficace. Non seulement le gouvernement devrait-il s’engager à financer la SRC de façon stable et prévisible sur des périodes de cinq ans, en suivant l’inflation, mais il devrait aussi promettre de faire porter son financement à 40 $ par personne par année. Le gouvernement peut s’acquitter de cet engagement en augmentant graduellement les crédits budgétaires de la SRC et en étudiant d’autres structures de financement qui pourraient compléter ou, le moment venu, remplacer les crédits budgétaires si ces structures s’avèrent suffisamment fructueuses. D’autres pays ont très bien réussi à ce chapitre.

Avec une dotation plus élevée, la SRC devrait renoncer complètement à la publicité commerciale, laissant cette activité aux radiodiffuseurs privés. L’absence de publicité à la radio a été positive pour la SRC. Ce modèle lui permettrait d’emboîter le pas à la BBC au Royaume-Uni et à HBO en Amérique, qui diffusent leurs programmes sans interruption publicitaire à la grande joie des auditeurs.

Puisque la consommation en ligne ne se dément pas, la SRC devrait lancer un service de diffusion en continu semblable à celui de Netflix. Ce service devrait être offert gratuitement aux Canadiens, leur permettant de profiter du contenu du radiodiffuseur sur le support de leur choix.

Au sujet de la gouvernance, le Comité veut que les nominations au conseil d’administration relèvent uniquement du premier ministre. Je ne suis pas d’accord. Nous avons besoin d’une nouvelle façon de faire. Il faudrait mettre sur pied un comité de sélection multipartite ou établir un processus de sélection indépendant pour les nominations au conseil. Cette démarche en améliorerait la responsabilité, la transparence et la compétence. Une fois constitué, le conseil nommerait un président qui jouit d’une expertise reconnue dans le monde du commerce et de la radiodiffusion.

Finalement, je suis vivement contre la recommandation du Comité voulant qu’ « une part du financement de la SRC soit réaffectée à un fonds global externe qui servirait à financer la création de contenu canadien ».

Sans financement supplémentaire, cette mesure handicaperait une organisation qui est déjà à court de moyens. Et d’où proviendrait l’argent? Si nous souhaitons créer plus de comédies et de drames canadiens, il est insensé de ponctionner ces secteurs au sein de la SRC – il faudrait donc que l’argent provienne de l’autre branche de la SRC, soit les informations.

Or, les témoins nous ont dit toute l’importance que revêtent les informations de la SRC pour notre pays. Ces informations offrent une perspective unique et une analyse en profondeur des enjeux, qu’ils soient locaux, régionaux, nationaux ou internationaux, contribuant ainsi à la vigueur de notre démocratie.

La SRC est tout aussi importante aujourd’hui que lors de sa fondation. Les Canadiens veulent un radiodiffuseur public, solide et viable, qui puisse nous rassembler, nous informer, nous divertir, tout en cultivant et faisant connaître notre identité nationale.

Vous pouvez reproduire cet article d’Options politiques en ligne ou dans un périodique imprimé, sous licence Creative Commons Attribution.

Creative Commons License